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«C’est en traitant autrement chaque langue, en greffant les langues les unes sur les autres, en jouant de la multiplicité des langues que l’on peut lutter contre le principe colonisateur.»
JD La Crise de l’enseignement philosophique , 1978.

J’ai trouvé par hasard cette phrase qui légendait une photographie dans un livre que j’aime bien. Je n’ai pas de «recette» pour «traiter autrement» ou «greffer», mais par contre je crois voir un peu comment fonctionne le «principe colonisateur», comment il s’agit de «rogner» progressivement la langue de l’autre en y disposant par exemple quelques insignifiantes expressions, de ci, de là, ou en négligeant d’entendre à peu près ce qui est dit, envahir, effacer, jusqu’à la légitimité à être autre. Cela vaut aussi pour le paysage. Toute différence, hors exotisme, deviendrait un affront. Le mouvement colonisateur le plus vaste, ce jour, objective l’uniformisation; fi des différences, fi donc des rencontres; le «même» «sème» – voyez voir par exemple à utiliser encore ce vieux «fi» –…

KO TOKAGE NO MATATAKU KAO YA UMA SHITA

est la transcription d’un Haïku que je proposais de «traduire» à de jeunes artistes. «Traduire», c’est à dire travailler et parler avec ça, sans l’échanger contre «le» sens. Après des jours de travail pour ça, ils ne savent pas que l’on peut entendre en français KO-TOKAGE NO MATATAKU / KAO YA UMA SHITA = un petit lézard / clignait des yeux / sous le cheval. Et, de mon côté, je suis bien obligée de me demander «ce que ça veut dire pour moi» un haïku, le japonais. J’ai une histoire dans ma langue avec quelques autres langues, même si je ne les parle pas, ici avec «le japonais» parce que je lis des haïkus, et une partie de mon histoire est de ne pas comprendre. Je ne sais pas si vous me suivez? Je pense juste que je ne suis pas la seule, et même que ce n’est pas seulement un truc de lectrice ou d’écrivain.

J’avance progressivement.
Le projet mis en oeuvre aux Laboratoires d’Aubervilliers est une expérience [1] de même nature que celle du «petit Lézard sous le Cheval» ; il s’agit pour une part d’expérimenter la partie de quelques histoires personnelles qui concerne le fait de ne pas comprendre. De supposer, par exemple, que la langue de chacun, c’est-à-dire l’histoire singulière, a rapport à d’autres langues même «inconnues» (surtout?). Et, puisque j’ai commençé par du vaguement théorique, je reviens au fait qu’il s’agit de pratiquer, je le redis, cette ignorance, au bénéfice, je le souhaite, de la construction de chaque histoire personnelle, d’un petit moment de construction.

PRA STA - PRA ETA

est un long poème de Maïakovski, que j’ai cherché à lire en Russe au Musée Zadkine en 2007. Je ne comprends ni ne lis le russe, mais je «connais» Maïakovski, et le russe comme ma langue maternelle; à preuve cette volonté de le lire de la même manière que je déchiffrais le français au moment de mon apprentissage de la lecture. Je ne parlerai pas ici de ma mère russe, c’est un exemple seulement de mon histoire, mais je donnerai un extrait de la conférence produite donc ce 27 juillet [2]:

(…) Pour me justifier de finalement au mieux déchiffrer comme vous l’avez entendu, j’explique ceci: je voulais retrouver ça, précisément, le moment où l’on déchiffre les mots lettre à lettre, avec le doigt sous les lignes, comme on le fait quand on apprend à lire sa propre langue. C’est à dire le B.A.BA des premières lectures, tel qu’il supporte aujourd’hui (et autorise) ma présence ici.
Seulement, si Micha m’apprend aujourd’hui à lire, dans une autre langue, je le préviens que je ne souhaite pas du tout la parler, et pour rien au monde faire les exercices de conversations qui me permettraient de demander mon chemin, de faire les courses, de téléphoner par exemple.
Toutefois un échange comme celui-ci:
— komnata tout, a akno tam?
— da, tout komnata, a tam akno
soit en français :
— la chambre est-elle ici et la fenêtre là-bas?
— oui, ici est la chambre et là-bas la fenêtre.
que l’on lit dans l’une des premières leçons du manuel que nous avons quand même acheté, ne me déplait pas fondamentalement, puisqu’il est proche de ne vouloir rien dire.
 

(2) La connaissance des langues (la fidélité)

On peut penser que j’ai dû, en prenant la décision de lire en Russe, vouloir être fidèle au texte de «Maïakovski», même si moi-même, en Russe, je ne le comprends pas et ne l’aurais probablement jamais connu sans l’une de ses traductions. Ainsi, je le lis ce soir, tel que, finalement, je ne l’avais jamais lu avant de préparer cette lecture.
Je ne lisais d’ailleurs pas même du tout le Russe avant de poser le terme absurde de cette fidélité à la langue originelle, peut-être en fait comme fidélité dans la langue, c’est à dire en fait à la mienne vous l’aurez compris: «je lis Maïakovski en Russe parce que j’écris et parle en français».
Entendez bien que je suis généralement incrédule quant à l’apprentissage des langues, a fortiori quant à la connaissance des langues. J’ose à peine, mais je vais le dire quand même: j’ai toujours un soupçon à l’égard de ce que peuvent dire ceux qui parlent facilement plusieurs langues et pourraient en parler de nouvelles encore – il y en a parmi mes ami(e)s les plus chèr(e)s. Il n’est pas impossible, si vous voulez, d’entendre que je les envie, ce n’est pas faux, mais également CE N’EST PAS SI SÛR –. Entendez plutôt que j’ai envié longtemps ceux qui parlent facilement, a fortiori n’importe quelles langues, mais ce n’est plus non plus très sûr aujourd’hui qu’à mon tour je fais des conférences.
Ma difficulté avec les langues posera peut-être un problème à ceux qui sont là ce soir pour entendre de la poésie. Mais, je suis ici POUR Maïakovski, et pour ce thème dont il parle. Et dont je ne suis pas sûre que je parviendrai à dire finalement quoi que ce soit – alors même que, vous ne le voyez pas, c’est ce que je tente – : "IMIA ÈTOI TÉME ", "le nom de ce thème est…"; dans le texte il ne le dit pas, mais je vous le dis quand même, en russe: « lioubov », en français: «l’amour».
BON j’aurais pu choisir un auteur qui écrit avec du Français, mais j’ai probablement cru longtemps que Maïakovski, comme TOUS les auteurs, écrivait en Français. C’est probablement l’une des raisons qui m’a soudain rendu nécessaire de le dire en Russe, tel qu’ainsi je le lis DÉSORMAIS, en RUSSE, et quoi que vous entendiez ce soir.

(3) Je fais la connaissance de Micha

«Je vais vous donner des cours de Russe», a dit Micha. À cet effet nous nous sommes procurés un manuel de la série «en 90 leçons» qui, après l’expérience de la fenêtre et de la maison, a très peu servi, et bien que j’ai eu tout de suite l’impression de trahir par des «cours» mon projet, je cèdai immédiatement au premier événement qu’il provoqua : la rencontre de Micha, bientôt suivie de celle de Ionah.
Et ceci, me dis-je, renoue avec l’«idéité» russe de mes onze ans, réalise mon projet de lecture d’une autre manière; je débute ainsi «Maïakovski (c’est-à-dire
 le Russe) par l’étude du poème qu’il a écrit pour les enfants : TCHTA TAKOE KHALACHO I TCHTA TAKOE PLOCHO ? (QU’EST CE QUI EST BON ET QU’EST CE QUI EST MAUVAIS ?) c’est à dire que JE SUIS (comme) EN RUSSIE ou Ionah, qui à cinq ans connait pas coeur ce grand poème, m’apprend à rouler les « r » et que, TOUT est nouveau. Je (me) dis :
  — IL ARRIVE QUELQUE CHOSE QUE DEPUIS LONGTEMPS JE VOULAIS.
En effet, je réalise aujourd’hui, en apprenant le Russe dans un livre d’enfant, ce que je voulais alors, à dix ans, quand découvrant Maïakovski je lisais mon premier auteur Russe, ce que je voulais: ÊTRE UNE ENFANT RUSSE. Je vous laisse observer la transformation et comprendre ce que cela veut dire, ainsi que supposer ce que je me dispose à vous faire croire.
Avec ce livre, Micha a aussi apporté logiquement un manuel scolaire pour les enfants Russes qui apprennent à lire et écrire: je trouve ainsi réunis mes deux heureux moments scolaires: le Cours préparatoire et l’université. Entre les deux l’enfer (ce qu’il faut retenir) et ce n’est peut-être pas du tout «une autre histoire» qu’il ait été alors IMPOSSIBLE d’y choisir le Russe.
 J’apprends donc l’alphabet, mais je ne veux absolument pas je l’ai déjà dit, m’initier aux conversations pratiques [celles des écoles et des guides de voyages] je préfère lire:
     «la meute des menaces a déployé ses voiles»
ou «Au secours ! Au secours ! Au secours ! Au secours !»
ou «Quelle est cette terre ?
Ce pays ? Groen-Lapon-Amour-land ?» 
 À l’occasion apprendre qu’en novembre 1922 Maïakovski est à Paris où il assiste à l’enterrement de Marcel PROUST [je vous livre ça dont vous vous souviendrez et qui est tout à fait hétérogène, je dis hétérogène en soi, à la découpe habituelle des histoires nationales (par exemple).

La performance

Je prendrais donc des cours de Russe du jour de ma rencontre avec Micha, à aujourd’hui ce 27 juillet puisqu’après j’ARRÊTE TOUT, validant de ce fait qu’il y aura bien eu une PERFORMANCE.
Rien, non plus, je le sais, ne m’empêche de continuer après; je n’arrête rien du tout, j’apprends le russe, Maïakovski par coeur, et pour la première fois de ma vie je parle couramment une langue étrangère qui est la première que j’aurais voulu parler. Voilà la réussite.
En attendant ç’en est peut-être une déjà de faire cette conférence, parce que suite à la proposition de Jérôme Mauche pour le Musée Zadkine de lire de mes textes et de ceux de quelqu’un d’autre, je m’imaginais ici dans la situation suivante; je lis quelque chose de moi, quelque chose de Maïakovski, et sur ce modèle je ne vois pas comment éviter la comparaison ou la parentalité, qui l’une et l’autre ne me disent rien – donc je préfère écrire le texte que je suis en train de vous lire sur ma lecture aujourd’hui de Maïakovski dans une langue que je ne lis pas, qui s’il n’est tout à fait un poème, est bien une fiction, infestée de probabilités, de hasards, de croisements, que je n’ai pas inventés.

(…)
J’ai dû, pour mon essai de ce soir répéter souvent et beaucoup (je ne l’ai pas fait autant que je l’aurais du peut-être mais l’objectif restant de ne pas y arriver çA VA). La première fois je riais plutôt nerveusement devant l’idée, l’ampleur, l’improbablilité de ma tentative qui devriendrait peut-être: «Comment je n’ai pas lu Maïakovski le 27 juillet au Musée Zadkine», après m’y être longtemps préparée.
 J’insiste sur l’utilité de toutes sortes d’opérations préparatoires qui, si elles n’apparaissent pas finalement, n’en constituent pas moins une part essentielle de ce qui apparait.
 J’ai dû, par exemple apprendre les écritures majuscule et minuscule de l’alphabet, non sans difficultés, entre autre à cause de ma familiarité avec l’alphabet grec; les hésitations venant le plus souvent des ressemblances, comme d’avec l’alphabet français le T majuscule qui s’écrit comme un C, le D minuscule comme un g, le I minuscule comme un u, le B minuscule comme un delta.
«Je sais bien l’alphabet du grec ancien» ne veut pas dire que je connais bien le grec ancien. En effet, je ne souhaite pas d’exception à mon ignorance – et ainsi à l’idée de mon effort pour en sortir.
Il est en outre temps pour moi de trouver une langue à parler, de la parler avec tout le monde, comme tout le monde, sans raison, pour rien, dans une totale indifférence de moyens.
Je rêve ainsi désormais de l’un de ces moyens comme «À NOUVEAU DE LA POÉSIE», sans plus jamais procéder toutefois à la moindre coupe dans une ligne. Un nouvel empêchement, après avoir connu l’incapacité inverse, mais je ne renonce pas pour autant à l’idée de ME TENIR DANS LA COUPE.

Je préfère une langue inemployée

Je reviens aux premières phrases des manuels de langues et leur attachement aux usages: demander son chemin dans la rue, être présenté à quelqu’un, téléphoner, faire des achats, toutes choses pour lesquelles à plus d’une reprise j’oublie ma propre langue – de la même manière, souvent, «ma maison n’est pas ma maison» (c’est vite dit «ma maison») je lui préfère la rue, c’est à dire une espèce de langue flottante, (dés)amorcée, mobile, inemployée – ainsi j’apprends à lire le Russe par Maïakovski alors que, c’est vrai, je ne sais pas dire «bonjour» et INEMPLOYÉ ce que j’apprends me ravit – j’acquiers la certitude par là (la rue) d’une langue intime (russe ou autre).
(…)

Ce poème donc commence par une première partie intitulée: «Ballade de la Geôle de Reading (sic)» (BALLADA REDINLSKOÏ TIOURMbI) qui est le titre d’un poème d’Oscar Wilde dont le refrain est, en Français, quelque chose comme:
«et chacun tue la chose qu’il aime, que tous entendent ceci: les uns le font avec un regard de haine, d’autres avec des paroles caressantes, le lâche avec un baiser, l’homme brave avec une épée».

PRA ÈTA comprend ainsi trois parties, après une introduction de quelques pages que vous avez déjà entendue mais dont je voudrais vous proposer une analyse alphabétique comparée des deux traductions: PRA TCHTA — PRA ETA ?


Voici d’abord la lecture alphabétique de la traduction de Claude FRIOUX SUR QUOI – SUR CA ? donc:

  A a a a a a a à à à À abordé affaires affûte agitant ai alphabet âmes arrache au aussi autres aux avec Beauté billets bondir bonnet Bouddha bramant C’ c’ ça ce ce ce ce ce ce ce ce ce ce Ce Ce Ce ce ces champignon chanson chansonné clair coeur cogne cogne colère commande commande comme comme comme contre contre coudes courant couteau couteau croix cuisine d’ d’ d’ d’emblée Dans dans de de de de de de de des des des des des Désormais détourne devient dise dispersé domestique donc du du du du Du éculé écureuil effaçant effleure effondre empoignés en en en en en encore enfouit enténébré escarpé essaie est est est est est est est et et et et et et et et et et et et et et et et eût évanouisse événements feu fois Frappeur front furieux géant gens gorge gratte grimaçant grince hors houle il il il il il il Il il il il Il infirme infirme instincts j’ jamais jour jours Kazbek l’ l’ l’ l’ l’ l’ la la la la le le le le le le le le le le Le les les les les les les les lignes livre lui m’ m’ mais maîtres Mars marteau mille mille mis moi moi moi moment mon mors nasille ne nègre nom on on on on on orage ordonnant ordonne ordonné oublier pain papier papier par par par partage peaux personnel plonge plus plus poétique poignets porte-coeur porte-drapeau pour pousse poutre prépare près prière puis qu’ qu’ Que que Que Que Que que Que que quotidien regarde regarde regardé répand résiste resserres resté retourne rouge rusé S’ s’ s’ s’ s’ s’ sa sa sans scintillent se se seconde secoue ses seul seul soie soleil sommeil sonne sous sous sous strophes sur sur survenu survienne survienne survienne survienne survienne tambour tempes ténèbres terre thème thème thème thème thème thème thème thème thème thème thème thème thème thème tourné tourné tous trouble un un un un un un une une une une une va valse Vérité vers veux voix vraiment

Maintenant la traduction de DAVID : DE QUOI – DE çA ?

  A a à à à à à à à à à abécédaire affaires affaisse ai aigle aigre aiguise ait âme âme appétit arcanes arme arrache au au aux avance batte Batteur beauté billets bolet bondir Bouddha C’ ce ce ce ce ce ce ce ce Ce Ce Ce Ce Ce ce ceci ceignant cette chant chapeau chez clair coeur colère contre corps cours couteau crève cri crispé croix d’ d’ d’ d’ d’ d’ Dans dans dans Dans de de de de de de de de de décréta des des désormais détacher détourne dispersa dit doué du du du du Du éblouit écartés écris écureuil effleure empara en en en en en encore encore enténébra entourage est est est est est est est estropié estropié et et et et et et et et et et Et et et et et et et étique eut évinça fait faits feu feuille forges fredonne fureur géant gens gorge grince homme il il il il il il il Il Il il Il inaccessible inspecta instant instant instincts intima-t-il inusable j’ jamais je je jour journalière jours l’ l’ l’ l’ l’ l’ l’ l’ l’ l’ l’ l’ la la là le le le le le le Le les les les les les les leur livre lui lui m’ m’ ma maître malice Mars même moi moi moi mors mort moutonnement n’ n’ ne nègre nez nom nos office on on on on on ose ôte oublier papier partage passant personnel peu plein plonge poème poétique poignets portant porte-enseigne posé pourtant poussé prends prescrit prescrit présenté prêt prière pris puis qu’ Qu’ qu’ quand Que que Que Que Que Que que qui râtelant Regarde requiert résiste ritournelle rouge rythme s’ s’ s’ s’ s’est sa sang sans se seconde secoue semble-t-il sempiternelle seul seul seulement soie soleil sommeil sommet son son sonne sous sous sous survenu survienne survienne survienne survienne tel tempes ténèbres terre têtes thème thème thème thème thème thème thème thème thème thème thème thème thème thème ton tourné tourner trouble un un un un un un un un une une une une valse vérité vers vie voilà voit voudrais vous vous vous vous y y

On remarque les choses suivantes:

VOUS apparait 3 fois chez David 0 chez Frioux.
2 Y chez David pour aucun chez Frioux.
SANG n’apparaît pas chez Frioux.
THÈME apparaît à juste titre 14 fois chez chacun.
CHAPEAU n’est pas chez Frioux.
364 mots chez David pour 349 chez Frioux, je fais le calcul pour nous : 15 mots de plus chez le second, mais nous ne pourrons pas déterminer LESQUELS puisqu’ils n’ont par ailleurs pas utilisé les mêmes, toutefois je remarque que la ligne des G chez Frioux: géant gens gorge gratte grimaçant grince, contient deux mots de plus que celle des G chez David: géant gens gorge grince. Ces mots sont GRATTE et GRIMAÇANT, sans quoi la ligne serait identique.
Kazbek, n’apparaît pas chez David (qu’on lise KAZBEKA dans le texte de Maiakovski, n’est pas pour autant un gage de « justesse », croyez moi si vous voulez).
MARS est dans un cas entre MAÎTRE et MARTEAU, dans l’autre entre MALICE et MÊME.
MARS et BOUDDAH, contrairement à Kazbek apparaissent dans les deux textes.
Pour un ÂMES au pluriel chez Frioux, on a deux ÂME au singulier chez David. On ne peut pas vraiment voir que CUISINE vaut pour OFFICE entre les deux textes (et donc réciproquement).

(…)
Un dernier point à propos de l’escalier.
À partir de PRA ÈTA, le vers est présenté en escalier. C’est comme ça que je l’ai toujours connu. Je me rappelle ça: pour moi l’escalier est Maïakovskien et ne souligne pas obligatoirement la construction syntaxique.
 L’escalier, à dix ans, me paraissait révolutionnaire, je ne peux dire par rapport
à quoi alors que JE NE CONNAISSAIS RIEN D’AUTRE: je n’avais lu que Maïakovski, bien qu’en français, et je rappelle que pas une seule fois, en sept ans d’apprentissage scolaire de l’allemand, je n’ai eu à lire un poète allemand, AUCUN, qui eu pu, peut-être corriger ce goût naissant de l’escalier.
Donc, j’aimais déjà, l’escalier en témoigne, l’idée de révolution, c’est en partie de ca que je vous entretiens ; de même qu’alors, je vis dans l’agacement continu de vouloir changer quelque chose, je ne veux pas faire semblant de vous dire que je ne sais pas exactement quoi, c’est bien, avec Maïakovski, de çA, qu’il s’agit:
«À bas votre amour, à bas votre art, à bas votre société, à bas votre religion», qui, je vous l’accorde cependant, sont encore aujourd’hui un peu aussi les miens.
 Mais quand même je regrette la pose moderniste: Le front ou les joues ornés de dessins étranges, j’aurais commencé la soirée comme Maïakovski lui-même, en m’installant sur scène pour y boire du thé «comme un escargot», (je tiens cette comparaison de Micha). L’extravagance de mes propositions aurait entrainé rixes, altercations avec la police, et critiques acerbes, quand en vérité je préfère plaire, n’est-ce pas?
     

[1] Il s’agit de rencontres régulières entre quelques personnes qui ne parlent pas de langue commune et pour répondre à la question de ma position par rapport aux participants, je dirais aujourd’hui qu’il s’agit d’établir les conditions d’une expérience commune. Que je suis interessée par cette expérience (en témoigner) et ces traces comme matériau. Je souhaiterais que ce soit en fait la même chose pour chacun; une expérience avec la possibilité d’en témoigner et d’en élaborer les traces (ne serait-ce qu’en «choisir» certaines, les associer, les raconter). Ma position, mon rôle est de permettre cette expérience.

[2] 0riginellement ce texte fut écrit pour être dit. Le travail de le (re)produire pour un lecteur reste à faire.