Le projet de Julia Varga a été initié dans le cadre d’un partenariat des Laboratoires et de Mosaïque, structure d’accueil du service municipal Hygiène et Santé de la Ville d’Aubervilliers.
Mosaïque, situé à proximité des Laboratoires, s’adresse aux jeunes de 12 à 17 ans habitant le quartier Villette Quatre-Chemins ou scolarisés dans le secteur. La structure est ouverte hors temps scolaire et son activité est tournée essentiellement autour du bien-être et de la santé: accueil, écoute, prévention, orientation et suivi des jeunes; services (douche, lave-linge, distribution de préservatifs); petits-déjeuners; ateliers et animation autour de questions de santé.
Les jeunes du quartier fréquentent ce lieu, librement, gratuitement, sans inscription préalable, sans régularité prédéfinie. Ils s’y rendent pour être écoutés, informés et soutenus dans leurs difficultés ou tout simplement pour se reposer, discuter, dans un lieu où les seuls adultes admis sont le coordinateur des actions santé jeune, Bobeker Brahimi, et les responsables de la structure, Ariane Pouchard et Fatiha Chaoui.
Partant du constat que les usagers de la structure ont du mal à trouver leur(s) place(s) et que les représentations qu’ils se font d’eux-mêmes tendent à exacerber leur rapport à la violence, les responsables de la structure se sont adressés aux Laboratoires pour élaborer un projet en collaboration avec une ou un artiste autour de la notion d’estime de soi.
Julia Varga est artiste plasticienne, son travail se présente sous la forme de photographies, diaporamas vidéos, films et installations. Elle appréhende tour à tour divers phénomènes sociaux, via une approche qui peut s’apparenter à l’ethnologie. Sa démarche, souvent nourrie de collectes, revisite les méthodologies documentaires. Une première phase d’observation a eu lieu entre juillet et septembre 2008, au cours de laquelle Julia Varga s’est rendue régulièrement à Mosaïque pour comprendre s’il était envisageable de réaliser un projet artistique dans ce contexte. L’artiste a ensuite introduit une caméra vidéo, qu’elle a utilisée avec les usagers de Mosaïque, de façon spontanée et sans passer par un apprentissage particulier.
Cette imprévisibilité lui a permis de se greffer sur le fonctionnement quotidien de la structure avec ses aléas, sans créer un temps spécifique de type «atelier».
«À la proposition de Mosaïque et des Laboratoires, j’ai choisi de répondre favorablement, parce qu’elle me permettait, dans le droit fil de mes travaux antérieurs, de découvrir, d’aborder, dans une démarche quasi-anthropologique, un groupe d’adolescents réunis dans un même lieu propice à la parole et à l’écoute. Je me suis inspirée de la beauté mais aussi parfois de la violence qui émergent de cet endroit singulier, le huis clos ne laissant aucune échappatoire, aucun repos ou possibilité de sublimation. Le titre, Check Poto, reprend une scène potentielle du film, où l’un des jeunes s’adresse directement à la caméra et la salue par le geste et cette expression langagière familiers aux adolescents des Quatre-Chemins.
Le tournage a été mené de façon intuitive, sans narration préécrite, en misant sur un travail de la durée et la familiarité progressive des jeunes à ma présence et à celle de la caméra.
Je tiens d’ailleurs à ce que le film reflète les différents rapports que les jeunes ont pu établir avec elle, symptomatiques de la relation complexe qu’ils entretiennent avec leur propre image. La caméra est parfois amie (on la salue, on l’embrasse), objet d’attention (on se met en scène, on crée pour elle une biographie fictive), témoin gênant (on préférait qu’elle n’enregistre pas les écarts de conduite), jouet (on utilise le micro et le casque pour réveiller son copain) ou confidente discrète (on lui raconte sa première histoire d’amour). […]» Julia Varga
---------------
Production déléguée Les Laboratoires d’Aubervilliers Un partenariat des Laboratoires d’Aubervilliers et du Service municipal Hygiène et Santé de la Ville d’Aubervilliers. Avec le soutien du Conseil général de la Seine Saint Denis (aide à la résidence). Ce film a bénéficié de l'aide au film court du Conseil général de la Seine Saint Denis.